jeudi 11 juin 2020

HOMELIE Dimanche de la FETE du CORPS et du SANG du CHRIST Jn 6,51-58 - 14 Juin 2020


HOMELIE Dimanche de la FETE du CORPS et du SANG du CHRIST
Jn 6,51-58 - 14 Juin 2020

 « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle… » Ces paroles, si elles sont prises au premier degré, sont choquantes et incompréhensibles. L’expression “boire le sang” viole l’un des tabous alimentaires les plus forts de la Loi juive (la kascheroute) : interdiction absolue de s’approprier le sang d’un animal et à plus forte raison d’un homme. Le sang, c’est la vie (Lévitique 7,11) et la vie appartient à Dieu. On comprend que cela en ait rebuté plus d’un.
Alors comment comprendre ces paroles et que croyons-nous lorsque nous allons recevoir le Corps du Christ ?
Quelques précisions de vocabulaire pourront les éclairer et en faire saisir la profondeur et le don incroyable que nous fait le Seigneur.
                   Contrairement aux trois autres Évangiles ainsi que Paul, l’Évangile de Jean n’emploie pas le mot corps “soma”, ce par quoi l’homme entre en relation avec les autres et l’univers, qui nous sollicite tant aujourd’hui et nous impose des règles sanitaires. Il emploie le mot chair “sarx”. Dans la Bible ce mot désigne non pas la matière faite de cellules, mais la personne qui est déterminée par son corps. « Toute chair verra le salut de Dieu »  « De nouvelle lune en nouvelle lune, et de sabbat en sabbat, toute chair viendra se prosterner devant ma face, dit Yahvé. » (Is 66, 23) et « Et si ces jours-là n’étaient abrégés, personne (mot à mot : toute chair) n’aurait la vie sauve ». (Mt 24,22) La chair  qualifie la condition terrestre et fragile, par opposition à l’esprit qui indique l’origine céleste ou divine : « Le Verbe s’est fait chair… , exprime l’abaissement du Fils du Père qui prend, sans tricher, notre condition d’homme avec ses limites.
                   Enfin, la chair, sous l’influence de l’hellénisme, désigne parfois la pesanteur de l’homme et sa propension au mal, au péché : « Car la chair convoite contre l'esprit et l'esprit contre la chair; il y a entre eux antagonisme, si bien que vous ne faites pas ce que vous voudriez » (Ga 5, 17)

         Quant au mot corps, il n’est pas sans signification non plus. Il n’est pas seulement la matérialité d’un être. C’est lui qui nous donne notre identité. Il y avait, jusqu’à il y a quelque temps, l’empreinte digitale ; il y a maintenant l’œil et évidemment l’ADN ! Je suis mon corps ! Quant au sang, il exprime évidemment la vie puisque sans lui, nous sommes morts. Quand Jésus dit aux Apôtres : « Ceci est mon Corps » Il dit : « Ce pain, c’est moi, et non un autre ! Quand Il dit : « Ceci est mon sang » Il dit : « Ce vin, c’est moi vivant ! ». Par ce langage symbolique, Jésus invite les siens à Le recevoir, Lui, Dieu, et à recevoir la vie qu’Il communique de sorte que nous pourrons, avec Lui, “livrer” notre vie, ce qui n’est pas le plus facile à faire.
                   Les paroles de Jésus portent encore un autre symbolisme très fort. Il est le Pain vivant : Il n’est plus ce pain que Dieu a donné chaque jour à son peuple, la manne, tout au long de son Exode pour le soutenir dans sa marche et le nourrir jusque la Terre Promise où il ne sera plus nécessaire. Il est le « Pain descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement ». Désirons-nous vraiment cette nourriture essentielle pour notre chemin sur la terre ? Ce pain qu’Il nous donne « pour que nous vivions éternellement »  jusqu’à ce que nous soyons arrivés au terme de notre vie, c'est-à-dire en Terre Promise ?  « Donne-nous notre pain de ce jour » demandons–nous dans le Notre Père. (Il est même écrit, mot à mot : Donne-nous le pain supersubstanciel). Il est tellement essentiel que Jésus ne nous demande pas seulement de le “manger” [Phagon] mais de le “mastiquer” [Trogon], comme les juifs étaient invités à mastiquer la chair de l’Agneau pascal pour goûter la libération d’Égypte que le Seigneur leur offrait. Ne devons-nous pas goûter à notre tour la libération que nous apporte “l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde” : Lui qui prend notre mal, nos péchés, pour nous en délivrer ?
                   Rendons grâce de tout notre être, corps, cœur, esprit, âme à Celui qui nous aime jusqu’à se donner entièrement à nous et en nous et qui nous invite à faire Corps avec Lui et à « former un seul corps puisque nous avons part à un seul pain » (1 Corinthiens 10,17) !

AMEN !

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