vendredi 29 octobre 2021

HOMELIE TOUSSAINT. "Les Béatitudes" - (Mt 5, 1-12a) - Lundi 1er Novembre 2021.

 

HOMELIE TOUSSAINT. Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)

Lundi 1er Novembre 2021.

 

« Heureux ! » Quel défi lancé au bon sens commun par chaque béatitude! « Heureux les pauvres, les doux, ceux qui pleurent, les affamés de justice, les miséricordieux… » C’est tout le contraire qui est proposé par la culture ambiante ! Oui, mais "Heureux" dans la Bible veut dire : "Bravo, félicitations: tu as tout compris ! " et même, en hébreu, ashsreï , peut se traduire par "en marche", car ce mot évoque la rectitude de l’homme qui marche sur une route qui va droit vers Dieu ! (note dans la Bible traduite par André Chouraqui)

Il convient bien sûr de ne pas faire de fausse interprétation sur ces béatitudes et tout d’abord, de les traduire correctement. Pauvre n’est pas opposé à riche, mais à orgueilleux (Pauvre de cœur, mot à mot : « petit de souffle » [pneuma et non cardia, est-il écrit dans l’original grec] c'est-à-dire gonflé de soi-même, et donc il y a de la place pour les autres… et pour Dieu ! Toutes les autres béatitudes en découlent et elle est au présent. Prenons quelques-unes de ces Béatitudes.

Ainsi,  "Heureux ceux qui pleurent ! "Mot à mot : Heureux ceux qui sont en deuil”. Car ils vivent un manque profond de l’absence de celui ou celle qui est décédé, et ce manque les rend aptes à chercher et accueillir ce qui les comblera définitivement : “Ils seront consolés” “Paraclèthèsountaï”. Ce mot est formé à partir du verbe Parakaleo qui signifie "appelé à côté de…" et qui dans l’Évangile de St Jean désigne le Paraclet c’est-à-dire  l’Esprit-Saint Lui-même, l’avocat, le consolateur (Jn 14, 16.26). Il s’agit d’une véritable promesse théologale, divine, où Dieu s’engage à être présent à nos côtés dans l’épreuve du deuil, bien au-delà de ce que nous aurions pu attendre.

Heureux ceux qui ont faim et soif de justice ! Il ne s’agit pas tant de la justice au sens habituel du mot, (qui est régie par des lois pas toujours justes ou mal adaptées) mais d’être  “ajusté à Dieu” ; ceux qui cherchent à comprendre et faire sa volonté, car ils constatent que bien souvent elle n’est pas respectée : nous la demandons en priant le  Notre Père.

Heureux les miséricordieux ! “Eléèmones, qui a donné en français aumône ; aumônier des hôpitaux, des galères…bref les miséricordieux sont ceux qui, comme Dieu, compatissent à la détresse de ceux qui endurent des manques essentiels.

Heureux les cœurs purs ! Littéralement : Purs [catharoï] de cœur” qui ne sont pas doubles ; qui n’ont qu’un seul comportement avec Dieu comme avec les autres. Nets. “Que votre parole soit oui, oui ! non, non ! Tout le reste vient du mauvais” Mt 5, 37. Il y a tant de mensonges autour de nous, colportés sur les réseaux sociaux, certains médias, publicité, quand ce n’est pas au cœur de nos familles, de nos entreprises ou  des institutions.

Voilà donc pour quelques-unes de ces Béatitudes traduites au plus près du texte grec d’origine. Elles relèvent toutes d’une même disposition : celle de la reconnaissance d’un manque

Mais elles peuvent aussi nous effrayer par leurs exigences.

C’est là que les saints nous sont d’un grand secours à condition de ne pas les prendre d’abord comme des héros, mais comme des femmes et des hommes de foi qui ont fait confiance en écoutant et suivant leur maître et Seigneur Jésus. Un jour ou petit à petit, ils ont été touchés par une parole du Christ et ils ont découvert qui était le Père dont parlait si souvent Jésus. Un Père passionnément amoureux des hommes et qui désire que chacun devienne son enfant comme nous le rappelait St Jean dans la deuxième lecture de cette fête. Bien sûr, le Père compte sur notre concours et ne fait rien sans nous : c’est une question d’amour respectueux. La multitude de ces hommes et de ces femmes que nous dévoilait l’Apocalypse a donc écouté le Fils et mis en œuvre une des béatitudes en l’accomplissant jusqu’au bout. Ils ont pris conscience de leurs manques ; ils ont su qu’ils ne pourraient être heureux tout seul ; que le Seigneur vient les sauver, les libérer de leurs enfermements, péché d’origine, s’il en est un ! C’est en nous engageant sur ce chemin de bonheur que l’Esprit de Dieu transforme notre cœur en venant l’habiter et en combattant avec nous contre les forces du mal. Jésus n’a-t-Il pas illustré Lui-même ces Béatitudes tout au long de sa vie ?

En Communion avec Lui et avec tous les saints et bienheureux, choisissons l’une des béatitudes et familiarisons-nous avec l’un ou l’autre de ces aînés en le prenant comme “parrain” ou “marraine”, mais également comme intercesseur, actif auprès du Père dans cette immense Communion des Saints que nous proclamons chaque Dimanche dans notre Credo.

Rendons grâce au Seigneur pour le Trésor spirituel qu’Il nous offre et Bonne Fête à Tous !

         AMEN !

jeudi 28 octobre 2021

HOMELIE 31ème Dimanche ordinaire B. “ Quel est le plus grand commandement ? ” - Mc 12, 28b-34 Le 31 Octobre 2021.

 

HOMELIE 31ème Dimanche ordinaire B. Mc  12, 28b-34

Le 31 Octobre 2021.

Quel est le plus grand commandement ? ”

Un scribe, un intellectuel juif connaissant bien les Écritures, s’avance vers Jésus, sans malveillance, et lui pose une question qui peut nous étonner : « Quel est le plus grand de tous les commandements ? »  La Loi juive comporte en effet 613 prescriptions pour les hommes, 365 négatives (autant que les jours de l’année), et 248 positives, (autant qu’il y a d’éléments composant le corps humain, selon la science de l’époque). Il s’en suit nécessairement des problèmes de choix  de priorités d’où la question du scribe.

Jésus lui répond en se référant à l’Écriture et en citant le premier commandement : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur… » (C'est-à-dire, tu t’attacheras au Seigneur, en particulier en cherchant à comprendre ce qu’Il veut dans ses Paroles). Ce commandement, le « Sh’ma Israël… » « Écoute Israël… » (Dt 6,4-5), est le Credo qui est récité chaque jour par les juifs ; le second commandement est la citation d’un passage du livre du Lévitique: « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19,18)

Le scribe alors approuve Jésus et ajoute que le rapprochement qu’Il avait fait des deux commandements de l’amour de Dieu et du prochain  « valait mieux que toutes les offrandes et les sacrifices » : autrement dit, il affirme que le commandement unique de l’amour est le vrai culte rendu à Dieu. Jésus voyant qu’il avait fait une remarque judicieuse, le félicite. Pourquoi ? Parce qu’il a interrogé Jésus sur la meilleure façon d’observer la Torah, lui qui a pourtant une grande connaissance des saintes Écritures ?

Non ! Je pense que Jésus a constaté que ce scribe est capable d’écouter Jésus et de reformuler "judicieusement" Sa parole. Cet homme écoute Dieu et pourtant, Jésus lui dit : “ Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu ”

Que lui manque-t-il donc à ce scribe pour qu’il soit dans le Royaume de Dieu ?  Il ne suffit pas de savoir ce que Dieu demande : il faut aussi vouloir et pouvoir le faire ; et comment vivre un amour si exigeant ? Comment respecter un tel commandement ? Le scribe devra attendre encore un peu pour comprendre comment entrer dans le Royaume de Dieu.

En effet, pour entrer dans le Royaume, il faut accueillir en soi l’Esprit de Jésus qui est proclamé dans tout l’Évangile et qui nous sera rappelé demain à la Toussaint par le magnifique message des Béatitudes. L’esprit Saint nous demande d’accueillir Jésus Lui-même, pétri d’amour, constitué par l’amour, qui a aimé jusqu’au bout et qui par sa mort et sa résurrection peut nous enraciner dans un amour toujours plus grand et plus profond. Il se charge de nos faiblesses en amour, et même de nos erreurs, de nos refus, de nos péchés, et nous donne son Esprit Saint. Il nous communique ainsi la force d’aimer qui va jusqu’au pardon et l’amour des ennemis. Jésus accomplira cela à Pâques, à Jérusalem : par la suite, les Apôtres, témoins, le révèleront après la Pentecôte. Le scribe, comme chacun de nous, pourra alors entrer dans le Royaume avec l’Esprit de Jésus. 

L’amour comme seule et unique règle de vie des croyants accomplit ce que la Loi proposait au peuple de l’Alliance. En communiant au Christ, nous entrons en communion avec Dieu et avec nos frères, communion inséparable qui, si elle n’est pas respectée, fait de nous un menteur : « Si quelqu’un dit qu’il aime Dieu et qu’il hait son frère, il est un menteur » 1 Jn 4,20.

Continuons à accueillir le Seigneur pour apprendre à aimer. Rendons-Lui grâce et comme le scribe, chantons : « De quel amour j’aime ta loi ! Tous les jours je la médite ! » Ps 118.  

Mais le Christ n’est-Il pas notre Torah ?

AMEN !

jeudi 21 octobre 2021

HOMELIE 30ème Dimanche du Temps Ordinaire B. " Bartimée, l’aveugle de Jéricho" - 24 Octobre 2021. Mc 10, 46-52

 

HOMELIE 30ème Dimanche du Temps Ordinaire B.

24 Octobre 2021. Mc  10, 46-52 

Bartimée, l’aveugle de Jéricho

Josué  sort de Jéricho (en fait, Jésus et Josué se disent dans la Bible grecque des Septantes de la même façon : Yeoshua, « Dieu sauve). Or c’est bien Josué, successeur de Moïse, qui, 1200 ans auparavant, conduisant les hébreux après 40 ans dans le désert, va conquérir Jéricho permettant l’entrée en Terre Promise.

Donc Jésus/Josué, nous dit St Marc au début de cet Évangile, a traversé la ville et il ne s’est encore rien passé. Continuons le récit.

Tandis que les disciples et une foule nombreuse accompagnent « Jésus de Nazareth », assis au bord du chemin, se tient un homme qui a perdu la vue, Bartimée. Était-ce de sa faute ou pas, comme le pensaient certains de ses contemporains, toujours est-il qu’il est exclu de la vie ordinaire, laissé sur la touche. Cependant, s’il ne voit pas, il écoute, en vrai fils de son peuple : tout israélite, ne répète-t-il pas trois fois par jour ce verset du Deutéronome (6,4), devenu la profession de foi de base de tout israélite : « Écoute Israël… » « Shema Israël… ». Dans sa nuit, Bartimée n’éprouve-t-il pas un manque profond de communication ?

Un cri jaillit alors de sa poitrine : « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi ! » N’est-ce pas là une vraie profession de foi messianique?  La foule ne voit en Jésus que le rabbi guérisseur de Nazareth à qui elle fait honneur et elle est pourtant gênée par les cris de détresse et d’espoir de cet aveugle. Mais lui, de plus en plus fort, clame sa profession de foi et son espoir : « Fils de David, aie pitié de moi ! ».

Malgré le brouhaha, Jésus s’arrête : lui aussi sait écouter. Alors la foule change d’attitude : « Bon ! Courage ! Lève-toi, Il t’appelle ! » Et lui rejetant son manteau, se libérant du peu qu’il avait, bondit vers Jésus.

« Que veux-tu que je fasse pour toi ? ». Quelle drôle de question ! N’est-ce pas évident ce que demande Bartimée ? Mais Jésus reconnaît en cet aveugle une grande foi qui lui a fait franchir tous les obstacles du mépris, du peu de foi de ces habitants de Jéricho qui n’ont pas su reconnaître en Jésus celui qui peut non seulement redonner la vue, si essentielle à une vie normale, mais encore le cri de détresse de cet homme blessé dans tout son être. Ne traduit-elle pas aussi toute la délicatesse de Jésus qui demande que nous disions clairement ce que nous désirons, même quand la demande est on ne peut plus naturelle et même immense ?  « Que je recouvre la vue ! » A comprendre au premier comme au second degré : voir, jouir de sa vue, et voir le vrai sens des choses telles que Dieu les voit. « Va, ta foi (cette autre manière de voir à la façon de Dieu) t’a sauvé ». Elle t’a fait entrer dans toute la lumière, Bartimée, à tel point qu’à présent, tu veux suivre ton Sauveur. « Il recouvra la vue et le suivait sur le chemin ».

Jésus quitte Jéricho pour monter à Jérusalem, cœur de la foi. Il va y être acclamée par la foule aux cris de : « Hosanna au Fils de David ! » (Marc 11, 8-10) et les gens jetteront leurs manteaux sur son passage.

         Le chemin de libération du Sauveur commence à Jéricho pour s’achever à Jérusalem, avec, comme pour héraut et premier sauvé, Bartimée. Ce chemin fait appel à la foi qui fait entrer dans la Vie :

ü “Voir” au-delà des apparences, comme Bartimée qui devint son disciple (acolyte dans le texte) et non comme cette foule « suiveuse » qui accompagnait Jésus.

ü Eprouver nos manques pour lui demander de les combler, Lui le Messie, le Fils de David, le Sauveur.

ü Suivre le nouveau Josué, suivre le libérateur, sur la route alors qu’Il monte à Jérusalem pour passer de ce monde à son Père, de cette terre à la terre promise définitive.

 

Bartimée : le fils de Timée, dit l’Evangile, mais cela ne nous renseigne pas beaucoup. Et pourtant, Timée, en araméen, désigne l’impur ; celui qui a péché : Bartimée, le “fils de l’impur” ; mais en grec, cela signifie : “Le fils très précieux” !

Ne nous invite-t-il pas à une magnifique conversion ?

AMEN !