jeudi 26 octobre 2023

HOMÉLIE 30ème Dimanche Ordinaire – A. “Quel est le plus grand commandement ?” Mt 22,34-40 - 29 Octobre 2023

 

HOMÉLIE 30ème Dimanche Ordinaire – A. Mt 22,34-40

29 Octobre 2023

 “Quel est le plus grand commandement ?”

“Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme (psuchè) et de toute ta pensée.” (Dt 6,5)  et “Tu aimeras ton prochain comme toi-même (Lv 19,18)

St Jean, dans sa 1ère lettre, l’exprime à merveille: “Si quelqu’un dit j’aime Dieu et qu’il déteste son frère, c’est un menteur: celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu qu’il ne voit pas !” (1Jn 4,20).

Or si l’on sait bien ce qu’est aimer son prochain, que signifie “aimer Dieu” ? N’est-ce pas tout simplement faire ce que Dieu voudrait que l’on fasse et que toute la Révélation et en particulier la première lecture de ce dimanche, extraite du livre de l’Exode (Ex 22,20-26), nous invite à faire ? Il y a aussi, bien sûr, tout l’enseignement de Jésus et son exemple.

Mais, Dieu peut-il nous “commander” d’aimer ? Alors que le véritable amour ne peut s’exprimer que dans la plus grande liberté ! Aimer ne se manifeste-t-il pas lors de la rencontre avec une personne qui donne à la vie une nouvelle saveur, un nouvel horizon et dans la plupart des cas, de nouvelles responsabilités envers ceux que l’on aime ? Le mot original, utilisé par St Matthieu, que l’on a traduit par “commandement” se dit:  entolè=entolh, qui signifie “prescription” : comme la prescription d’une ordonnance pour un médicament, (qu’il est vivement conseillé de prendre si l’on veut guérir !), et donc ce terme souligne le caractère personnel et invitant de l’amour que nous porte le Père.

Alors, qu’est-ce qu’aimer ?

Dans son Encyclique « Dieu est Amour”, §.3, Benoît XVI présente trois mots qu’utilise la Bible pour parler de l’amour.

“Eros” : erwV, que seul utilise deux fois l’Ancien Testament. Il désigne le désir qui attire vers l’autre et donne le plaisir de la relation, avant goût du bonheur définitif auprès de Dieu. Il convient de l’accueillir comme un don, mais aussi de le discipliner, de le purifier pour le conduire à sa vraie grandeur qui est union harmonieuse entre le corps et l’esprit, mais aussi communion avec l’autre, et non satisfaction de ses instincts.

“Philia” : filia , qui concerne l’amour d’amitié et qui est utilisé et approfondi dans l’Evangile de Jean pour exprimer le rapport de Jésus avec ses disciples.

Agapè” : Agaph , qui est démarche vers l’autre en le découvrant , dépassant le caractère égoïste et possessif,( cherchant son propre intérêt) et en cherchant  le bien de l’être aimé. Il donne, au prix de renoncements, mais aussi sait recevoir de l’autre. Il remplit de joie simple et conduit au bonheur paisible.

         Aimer Dieu et aimer son prochain ne sont jamais en rivalité puisque tous deux ont leur source en Dieu Lui-même. Il est Amour (1 Jn 4,7). C’est Lui qui aime l’étranger, la veuve et l’orphelin et qui me demande de les aimer et de les aimer comme Lui. Ou encore, les aimer comme moi-même, c'est-à-dire, m’identifier à eux, les aimer comme si c’était moi : autrement dit, si je ne les aime pas, je ne m’aime pas moi-même. Toute la Parole de Dieu contenue dans l’Écriture dépend de ces deux commandements. “A ces deux commandements, toute la Loi est suspendue et les prophètes”

Ces deux prescriptions, mises en pratique, sont pour ceux qui aiment en vérité, la signature de la présence de Dieu.

AMEN !

 

jeudi 19 octobre 2023

HOMÉLIE du 29ème Dimanche Ordinaire A– “Rendez à César ce qui est à César…" Mt 22,15-21 - 22 Octobre 2023

 

HOMÉLIE du 29ème Dimanche Ordinaire A– “Rendez à César ce qui est à César…

Mt 22,15-21. 22 Octobre 2023

 

“Rendez à César ce qui est à César…

Et à Dieu, ce qui est à Dieu” Mt 22,21

 

L’intention des pharisiens et des partisans d’Hérode est malveillante : ils veulent prendre Jésus en défaut. Après une introduction élogieuse mais tellement hypocrite, reconnaissant la droiture et la justice de leur interlocuteur, ils lui demandent son avis sur le paiement ou non de l’impôt à l’empereur. Leur question est très habile, car Jésus est acculé à dire oui ou non.

S’Il dit oui, Il sera considéré comme un collaborateur de l’occupant romain et perdra tout son prestige et son autorité auprès du peuple opprimé par ces mêmes romains.

S’Il dit non, Il sera considéré comme un opposant et dénoncé pour être emprisonné : ses adversaires en seront débarrassé !

Comment Jésus va-t-il s’en sortir ?

En bon pédagogue (et parce qu’il aime ses ennemis comme Dieu les aime), Jésus dévoile d’abord leur hypocrisie. Puis Il se livre à une petite démonstration toute simple : “Montrez-moi la monnaie de l’impôt” leur demande-t-il. Ils lui présentèrent une pièce d’argent. Il leur dit : “ Cette effigie  et cette inscription, de qui sont-elles? ” On a traduit par “effigie” le mot du texte original “icône” (eikwn). L’icône de la pièce d’argent du denier est celle de César, alors : “Rendez à César ce qui est à César… Et à Dieu, ce qui est à Dieu”

Mais quelle est donc l’icône de Dieu ? 

Bien sûr, on pense tout de suite au Christ. Paul écrit : “Il est l’image (l’icône) du Dieu invisible, le premier-né de toute créature” Col 1, 15.

Mais où trouve-t-on encore cette référence à l’image de Dieu ?

Elle se trouve tout au début de la Bible : “Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa…” Gn 1, 28. Or dans la Bible grecque des LXX (Septante), le mot image est le même que celui de l’évangile : « icône ».

De plus, en hébreu, le mot a une signification toute particulière : l’image, laTsélem, désigne la reproduction en plus petit d’une idole de divinité païenne. Ainsi à Babylone, chaque année, lors des grandioses processions en l’honneur de toutes les divinités, les serviteurs et fidèles de chaque divinité se rangeaient derrière un modèle réduit de la statue de la divinité (dont la statue originale ne pouvait être déplacée hors de son temple en raison de sa masse souvent colossale). Ils pouvaient également suivre la bannière, l’étendard, la “Tsélem” de leur dieu. L’auteur sacré de la Genèse, qui écrit à cette époque, reprend à son compte cette référence à ces manifestations religieuses. Dire que l’homme est “l’étendard de Dieu” c’est lui révéler qu’il est appelé à signifier, dans le cortège de l’humanité et de la création, la présence de Dieu.

Pour beaucoup, l’homme a trahi ce merveilleux désir de Dieu et défiguré son image. Ce qui faisait dire à Voltaire de façon ironique : “Dieu a créé l’homme à son image et celui-ci lui a bien rendu !” Dans son désir de sauver ses adversaires, Jésus les invite à retrouver de façon très inattendue, ce à quoi Dieu son Père les a appelés. Il faut donc que l’homme soit “rendu à Dieu” autrement dit qu’il redevienne ce qui est sa vocation première : révéler Dieu à l’humanité et la création entière, manifester sa présence dans un monde qui l’ignore, montrer partout que l’amour qu’Il nous donne est plus fort que la mort et son cortège de malheurs et de souffrances.

En Jésus, parfaite icône du Père, c’est chose faite.

Il reste à chacun à devenir, jour après jour, “icône de Dieu”. 

En cette journée mondiale consacrée à la mission dans le monde, n’est-ce pas cela qui nous est demandé ? N’est-ce pas cela que font les missionnaires d’aujourd’hui: laïcs, prêtres, religieuses et religieux, et tout baptisé, comme le pape François y invite : « Ensemble, osons la mission ! » ?

Je terminerai par le propos de Paul aux Corinthiens :

“…et nous tous qui le visage dévoilé reflétons la gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même icône, avec une gloire toujours plus grande, par le Seigneur qui est Esprit” 2 Cor 3, 18

AMEN !  

samedi 14 octobre 2023

28ème Dimanche Ordinaire A–“Allez donc aux croisées des Chemins: tous ceux que vous trouverez, invitez-les à la noce” Mt 22,1-14 - 15 Octobre 2023

 

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28ème Dimanche Ordinaire A– Mt 22,1-14

15 Octobre 2023

“Allez donc aux croisées des Chemins:

tous ceux que vous trouverez, invitez-les à la noce” Mt 22,9

 

Quel contraste, frères et sœurs, entre la grandiose et merveilleuse prophétie d’Isaïe que nous avons entendu en première lecture et cette parabole de ce roi invitant aux noces de son fils, qui face à l’indifférence, au refus et même au sort de ses serviteurs envoyés pour porter l’invitation qui sont mis à mort, va incendier leur ville ! Que veut nous faire comprendre Jésus par cette parabole ?

Mais tout d’abord, comme je l’ai souvent dit, une parabole n’est pas une histoire vraie qui s’est réellement passée : c’est un peu comme une fable (les fables de La Fontaine) mais c’est un récit « jeté à côté de nos vies » pour nous faire comprendre quelque chose: (parabolaiV:  Para=à côté ; ballo=jeter->ballon !) Et comme bien souvent dans les paraboles, il y a des propos excessifs, des comportements étonnants pouvant être mal compris et mettre mal à l’aise, par exemple :

-   Qui sont ces invités qui refusent de se rendre à des noces?  Qui sont ces invités qui maltraitent et même tuent les envoyés du roi ?

-   Quel est ce roi, qui, après avoir convié ses invités, envoie ses troupes punir les meurtriers et massacrer leurs villes ? Quel est ce roi qui s’obstine à vouloir, coûte que coûte, remplir la salle de noces de convives, avec des “mauvais et des bons”, que les serviteurs ont été cherché tant tout le pays ?

Cette parabole de Jésus exprime l’immense désir de Dieu, son Père de voir tous les hommes rassemblés pour les noces de Son Fils avec toute l’humanité : aucune condition, aucune appartenance, aucune morale, aucune identité, tout le monde est invité ! (Les noces dans la Bible sont souvent présentées comme le symbole de la communion joyeuse et définitive de l’alliance entre Dieu et les hommes qui sont pour Lui comme autant d’enfants).

 

         Dans la deuxième partie, le roi vient visiter les convives et il remarque qu’il y en a un qui n’a pas le vêtement de noces. Que peut bien signifier ce vêtement de noces ?

         Un vêtement, c’est important, Indispensable pour vivre. [Si 29,21 ; 1 Tm 6]. Il  l’est aussi pour dire qui on est : prophète, roi, grand prêtre, esclave. Il signifie également son état, sa fonction, son service : policier, soldat, joueur de foot…Il peut être aussi le signe de retrouvailles : le père revêt l’enfant prodigue d’une nouvelle robe, Luc 15, 22 ;

                   Enfin, quand Jésus est sur la montagne, il apparaît transfiguré et avec des vêtements éblouissants qui révèlent qui Il est réellement, Mc 9,3. Mais de nos jours encore, combien choisisse de porter un tee-shirt avec des mots dessus pour manifester ou signaler leur appartenance à un groupe, une équipe sportive…

         St Paul reprendra la symbolique du vêtement pour déclarer  « Vous tous en effet, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ ».Tout homme, à son Baptême, est ainsi revêtu du vêtement blanc des noces et, invité à recevoir le Corps de Son Seigneur, et il s’entendra dire : « Heureux les invités au repas du Seigneur ».

         Quant à l’homme de la parabole qui ne porte pas le vêtement de noce, il n’est pas dit qu’il est mauvais. Il est simplement dit qu’il resta muet : (mot à mot “muselé” efimwqh).  L’invitation au festin de noces ne l’a pas changé ; l’appel à se réjouir, à être associé au bonheur des mariés et du père qui les a invités, à le remercier, le laisse sans réponse,

Ainsi pour que cette parabole, qui ouvre à tous l’invitation au festin de noces, ne soit pas comprise de travers, laissant croire que, quoiqu’on fasse, “On ira tous au paradis…”, Jésus a mis en présence cet homme qui ne portait pas le vêtement des noces éternelles et il demande que nous “revêtions Jésus Lui-même”, que nous Lui soyons unis.

Quant à savoir combien il y aura d’élus,  Jésus ne répond pas. Cela dépendra des invités, c’est-à-dire nous tous, qui aurons revêtu l’habit de noce et qui voulons vivre dans la fidélité à notre Baptême ; qui aurons voulu suivre Jésus en étant unis à Lui, en particulier par la communion.

Le dernier livre de la Bible, l’Apocalypse, lève le voile sur cet avenir et nous montre ainsi la cité céleste, le ciel, le paradis : « Après quoi, voici qu'apparut à mes yeux une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue; debout devant le trône et devant l'Agneau, vêtus de robes blanches, des palmes à la main… » Ap 7, 9

N’attendons pas pour répondre à son invitation et faisons tout ce que nous pouvons pour suivre son Fils dès aujourd’hui !

AMEN !