HOMELIE
TOUSSAINT – Mt 5,1-12 LES BEATITUDES -
1er
Nov.2017
Connaissez-vous dans la Bible
quelqu’un, suivi d’une foule, qui gravit une montagne et reçoit les “Dix
Paroles” ? Vous l’avez tous deviné : Moïse, au Sinaï, sur le Mont
Horeb. Eh bien l’évangéliste Matthieu, au début du ministère de Jésus, va nous
le présenter comme le nouveau Moïse. Mais cette fois-ci, les Dix Paroles [que
l’on appelle habituellement les “Dix Commandements”, à cause de leur tournure
impérative] prennent la forme de dix propositions de chemin de bonheur. Voyons
lesquelles.
1. Heureux les pauvres de cœur ! Littéralement : “Heureux les humiliés
du souffle”. Les pauvres, ce sont les “dos courbés”, ceux qui
ont été humiliés et qui n’ont rien… Cœur : “pneuma”; Esprit Heureux ceux qui ont le souffle court, et donc qui
ne se gonflent pas d’orgueil, qui ne sont pas remplis d’eux-mêmes : ils
ont de la place pour Dieu et leurs frères ! Ou bien encore: heureux
ceux que l'Esprit rend humbles. Cette béatitude commande toutes les
autres : elle est au présent, alors que la plupart des autres sont au
futur : “Le Royaume des cieux est à
eux”. Le Royaume des cieux,
c’est l’espace divin : ils sont donc dans cet espace-là et Dieu leur est
présent de façon invisible encore, mais bien réelle. - 2. Heureux les doux !
“praèi”
Non pas les mous, mais ceux qui ne cherchent pas à s’affirmer
eux-mêmes et ne recherchent pas, encore moins, leur seul intérêt propre, mais
font attention à Dieu et aux autres ; savent renoncer à leur droit, leur
priorité ; cherchent à "arrondir les angles", tant l’existence
quotidienne peut être faite de contrariétés diverses. Ils ne sont pas
stressés : ils obtiendront la Terre Promise, lieu du repos éternel. – 3. Heureux ceux qui pleurent ! Littéralement : “…Ceux qui sont en deuil”. Car ils
vivent un manque profond, et ce manque les rendent aptes à chercher et
accueillir ce qui les comblera définitivement : “Ils seront consolés” Littéralement : Ils auront
la Consolation “Paraclèthèsountaï”
Vous reconnaissez le mot Paraclet qui désigne en Israël à la fois le
Messie (“Le vieillard Siméon [qui
venait tous les jours prier au Temple]
attendait la Consolation d’Israël” Luc 2, 25) et chez les chrétiens,
l’Esprit-Saint Lui-même, le Paraclet (Jn 14, 16.26). Il ne s’agit pas d’une
promesse du genre : “Pleure pas, ça
va passer ; après la pluie, le beau temps” mais d’une véritable
promesse théologale, divine, où Dieu s’engage bien au-delà de ce que nous
aurions pu attendre et qui va combler notre manque en profondeur. – 4. Heureux ceux qui ont faim et soif de justice ! Il ne s’agit pas tant de la justice au sens
habituel du mot, (qui est régie par des lois pas toujours justes ou mal
adaptées) mais d’être “ajusté à Dieu” ; ceux qui cherchent à
comprendre et faire sa volonté, comme Jésus nous a invités à le demander dans
le Notre Père. – 5. Heureux les miséricordieux ! “Eléèmonès” qui a donné en français : aumône ;
aumônier des hôpitaux, des galères…bref les miséricordieux sont ceux
qui, comme Dieu, compatissent à la détresse humaine ; En latin, c’est beau
aussi : misericors : “être
de cœur avec la misère des autres” – 6. Heureux les cœurs purs ! Littéralement : “Purs [catharoï] de cœur” qui ne sont pas doubles ; qui
n’ont qu’un seul comportement avec Dieu comme avec les autres. Nets. “Que votre parole soit oui, oui ! non,
non ! Tout le reste vient du mauvais” dira Jésus, dans le discours sur
la montagne qui va suivre en Mt 5, 37. – 7. Heureux les artisans de paix ! Ils seront appelés Fils de Dieu. Lorsque Jésus
envoie les disciples deux par deux, ils leur demandent de présenter à ceux à qui ils vont s’adresser la Paix :
Shalom ! Salam ! dit-on encore aujourd’hui en Terre Sainte, là où
elle fait actuellement cruellement défaut ; mais il s’agit encore d’une
autre paix, celle que Jésus présente aux Apôtres au soir de la
Résurrection : “La Paix soit avec
vous ! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie” Nous sommes mis au rang du Fils pour
achever sa mission jusqu’à la fin des temps : en cela, nous sommes
vraiment Fils de Dieu. La encore, c’est théologal.- 8. “Heureux ceux qui sont persécutés pour
la justice”, là encore, à comprendre comme “ajustés au projet ou aux
pensées de Dieu” qui ne sont pas celles des hommes et qu’ils rejettent. La
dernière béatitude - 9. “Heureux
serez-vous si l’on vous insulte…” et la finale : - 10. “Réjouissez-vous, soyez dans
l’allégresse…” [Ce qui, tout compte fait, donne bien les Dix Paroles de
Jésus] sont là pour parer à toute réaction naturelle face au scandale de ces
Béatitudes : en effet, ne prennent-elles pas à contre pieds et à
rebrousse poils les propositions de bonheur que le monde proclame sans
cesse par toutes sortes de médias ? Eh bien Jésus, au début de sa
prédication, veut nous éviter les fausses pistes du vrai bonheur.
Prendre conscience de nos manques ; savoir que nous ne pouvons être
heureux tout seul ; que le Seigneur vient nous sauver, nous libérer de nos
enfermements, péché d’origine, s’il en est un ! Alors, que ces
béatitudes soient nos “Dix Paroles”, celles qui nous entraînent vers la vie et
Celui qui est la Vie.
Heureux, “Makarios” signifie aussi en grec, Bravo
! Félicitations ! Vous avez tout compris ! Et en hébreu : “Ashréi”
En marche ! Tous
ensemble, à la suite de tous les Saints, qui Lui ont fait confiance et ont reçu
en héritage la Terre
Promise,
AMEN !
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