HOMELIE 25ème
Dimanche Ordinaire– Lc 16,1-13
18 Septembre 2016
La plupart des paraboles de Jésus mettent à l’épreuve notre sagesse
toute humaine. Pourquoi donc nous présente-t-il en exemple la réaction très
étonnante d’un maître trompé et volé par son gérant qui a falsifié les factures
des clients de son maître ?
Cet homme riche ne loue pas la malhonnêteté, la rouerie de son
gérant, compétent en affaire. Il fait plutôt l’éloge de son habileté. Face à son renvoi, qui le laissera dans le
dénuement, le gérant se montre “avisé”.
N’est-ce pas ce que recommande Jésus à ses disciples lorsqu’il les envoie en
Mission ? « Voici que moi, je vous envoie comme des brebis au milieu des
loups; soyez donc “avisés ” comme les serpents et candides comme les
colombes ». (Matthieu 10, 16). En quoi ce “fils de ce monde”
serait-il plus avisé que les fils de lumière ? Il a pris les richesses non
comme une fin en elles-mêmes, mais comme
un moyen pour se faire des amis lorsqu’elles viendront à lui manquer. Là
encore, n’est-ce pas ce que recommande Jésus pour clore cette parabole : « Eh
bien! Moi, je vous dis: faites-vous des amis avec l'Argent trompeur pour qu'une
fois celui-ci disparu, ces amis vous accueillent dans les demeures
éternelles. » (Luc 16, 6).
Cependant, Jésus ne parle plus de richesse mais de “l’argent
trompeur” et il utilise un terme qui est plein de signification. Le mot
argent vient du grec “arguros”
désignant également le métal argent. Mais ici, Jésus emploi le mot araméen “Mamôn”. C’est, pour les païens, le
dieu de la richesse. La racine de ce mot est “aman”, qui exprime “ce qui supporte,
sur lequel on peut s’appuyer ; ce qui est sûr, à qui l’on peut se fier,
qui résiste au temps et dure”. Cette racine primaire a donné d’autres mots
hébreux : “amen” d’où vient
aussi “émouna”, la fidélité et même “émeth”, la vérité, la
sûreté. Jésus associe à Mamôn le qualificatif de
trompeur, de malhonnête, l’opposé même de ce que suggère le mot rassurant
de Mamôn. Il ne donne en effet qu’une pseudo
assurance. Pris comme un dieu, un absolu, il est comme un leurre puisqu’il peut venir à
manquer. Il se montre alors trompeur, faux, et conduit à la désillusion, voire
au désespoir si l’on s’y est trop attaché.
Ces propos rejoignent bien d’autres passages de l’Evangile où Jésus
met en garde contre les richesses trompeuses et ce tyran qui rend esclave. « Et
quel avantage l'homme a-t-il à gagner le monde entier, s'il se perd ou se ruine
lui-même ? » (Luc 9,25) et aussi : « Mais Dieu lui dit:
Insensé, cette nuit même, on va te redemander ton âme. Et ce que tu as amassé,
qui l'aura? Ainsi en est-il de celui qui
thésaurise pour lui-même, au lieu de s'enrichir en vue de Dieu. »
(Luc 12,20-21).
Ne croyons pas être
si insensibles ou invulnérables face à l’attrait de l’argent. Il fascine comme
un faux dieu par toute sorte de chemins : compte en banque, boursicotage,
actions, obligations et surtout, jeux d’argent aux gains mirifiques qui ruinent
les petits revenus. Et puis, il donne ce sentiment de puissance qui peut tout
en achetant tout, parfois même les personnes ! Jésus non seulement nous
invite à prendre du recul par rapport aux richesses et à l’argent, mais il est
plus radical : il nous dit bien
qu’on ne peut servir deux maîtres, si opposés l’un à l’autre : l’AMEN,
Dieu qui est éternellement fidèle, juste et bon, présent, et MAMON, le
trompeur.
Que l’argent, certes
nécessaire, reste véritablement pour nous un moyen; que nous en soyons les “gérants” responsables qui alimentent, à la manière
d’un “gérant avisé”, notre trésor qui se trouve “dans les tentes éternelles”.
Nous irons certes à contre-courant de l’opinion commune. Jésus lui aussi a
affronté la dérision et, particulièrement, de ceux dont on s’y attendait le
moins. Dans le verset qui suit l’évangile de ce jour, il est dit que les
pharisiens, ces hommes religieux, (étymologiquement, “séparés” du peuple parce
que observant scrupuleusement les préceptes de la Loi) étaient “amis de
l’argent” (philarguroï) et ils se moquaient de Jésus. « Jésus
leur dit: " Vous, vous montrez votre justice aux yeux des hommes, mais
Dieu connaît vos coeurs: ce qui pour les hommes est supérieur est une horreur
aux yeux de Dieu. (Luc 16,15).
AMEN !
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