33ème
Dimanche Ordinaire A – (Mt 25, 14-30).
16
Novembre 2014
La Parabole des Talents
A
lire cette parabole au premier degré, ce maître que Jésus présente comme image
de Dieu est franchement rebutant ! Immensément riche, dur, autoritaire,
sans cœur… bref pas du tout ce que nous essayons d’imaginer du Dieu de Jésus.
Alors, pourquoi cette Parabole ?
Lisons bien la parabole : quel est le portrait de ce
maître ?
Les
deux premiers serviteurs ? Comment
le laissent-ils entrevoir, eux ? D’abord, ils reçoivent leurs talents
comme des dons. Le maître en effet remet au premier cinq talents, au second
deux. “Remet” = Donne : (en grec,
didomi) le mot désigne le don que l’on fait, dans un héritage par exemple
(comme pour l’enfant prodigue : Lc 15, 12). Il donne donc sans intention de reprise. Il lui transmet ainsi les
pleins pouvoirs sur ses biens qui ne sont plus les siens. Il fait plus : Il respecte chacun en leur donnant “chacun selon ses capacités”, c’est à dire, selon la force qui est propre à
chacun d’accueillir des responsabilités. Il est juste, délicat même ! Puis
Il part, longtemps… Là encore, après avoir donné, Il fait confiance, dans une
plus grande liberté laissée aux serviteurs du fait de son absence.
Aussitôt, celui qui a reçu cinq talents “va œuvrer avec” dit le
texte : il les travaille, les transforme, les fait valoir et les deux
premiers serviteurs gagnent chacun la somme équivalente à celle que le maître
leur avait confiée : cinq pour l’un, deux pour l’autre. La production est
bien sûr inégale, mais le comportement est identique. Inégaux dans “l’avoir”, ils sont semblables dans ce qu’ils sont :
des créateurs, des “fructifieurs” ! Que pensez-vous de ce
maître ? Ne serait-Il pas “Le Créateur”, L’éveilleur en humanité. Ne
l’a-t-il pas faite à son image, comme sa ressemblance, donc créatrice ?
Lorsqu’Il vient… (Il n’est pas écrit “lorsqu’Il revient” !)
. S’Il re-venait, ce serait pour régler ses comptes. S’Il vient, ne serait-ce
pas parce qu’Il est intéressé de se
rendre compte de ce que ses serviteurs ont fait des talents donnés (Lui qui
est immensément riche, avait-t-Il besoin de la plus value de ses serviteurs ?).
L’Evangile invite davantage à assister à
un compte-rendu de l’usage que les serviteurs ont fait de leurs dons,
plutôt qu’à un règlement de comptes ! D’ailleurs, lisons bien pour nous permettre de mieux
comprendre. L’Evangile écrit : “Celui qui a reçu 5 talents s’approche en
apportant cinq autres, disant : ‘Maître, tu m’as remis cinq talents.
Vois ! Cinq autres j’ai gagnés !’ - Très bien serviteur bon et
fidèle…” Avez-vous fait
attention ? Le serviteur ne présente pas dix talents, mais les cinq
qu’il a gagnés, son œuvre à lui, preuve qu’il a bien compris que son maître
lui avait donné les cinq premiers talents. Quant au maître, Il peut voir,
se rendre compte qu’il a bien placé sa confiance dans ces deux
serviteurs. Il peut alors consacrer ces
serviteurs, non plus dans ce qu’ils ont ‘en plus’ mais dans ce qu’ils sont
devenus, semblables à leur maître, capables de créer, de faire fructifier.
Ce maître retrouve des serviteurs à qui Il peut confier beaucoup, qui peuvent
entrer dans la joie de leur maître. Et tout
cela est bon, comme au temps de la Création où Il avait demandé à l’homme
de la faire fructifier.
Tout autre est l’attitude du serviteur qui n’a reçu qu’un
talent, lui aussi ‘selon ses capacités’. Il est d’usage de s’apitoyer sur lui,
mais regardons bien son comportement. Il n’a pas compris que le Maître lui donnait, comme aux autres, son
talent (somme colossale correspondant à 17 ans de salaire !). Se défiant
de son maître, (même attitude à l’origine
du premier péché, dit “péché originel», souvent inconscient, inavoué mais caché
au fond du cœur de l’homme), il va
se fabriquer une idée détestable de ce maître : exigeant, dur et sans
appel, un maître qui va revenir demander des comptes. Cette idée va polluer sa
pensée, son cœur, son imagination, si bien qu’il sera paralysé et qu’il n’aura
même pas l’initiative de déposer son talent à la banque pour le faire
fructifier : il l’a enfoui, enterré : comportement de mort, comme le
regard qu’il porte sur son maître.
La raison de cette parabole ?
Pas
seulement de nous faire savoir que Dieu attend que nous fassions fructifier nos
talents. Mais aussi et surtout nous
interroger sur l’image de Dieu que nous avons dans la tête ? Dans le
cœur ? Le voyons-nous comme un
personnage, sans état d’âme, qui nous demanderait de faire fructifier ses biens
et viendrait régler ses comptes avec nous jusqu’au dernier centime ? Un dieu d’une exigence telle qu’il ne
pourrait qu’engendrer l’inquiétude et la peur de ne pas être à la hauteur
?
Ou alors comme quelqu’un qui nous donne de ses biens, à chacun
selon nos capacités, sans intention de reprendre, mais en nous faisant
confiance, en nous voulant “créateur” comme Lui ?
…Et
qui n’attend qu’une chose : nous
donner davantage et nous faisant entrer dans sa joie.
Enfin,
comment comprendre la phrase finale, un peu énigmatique ?
“A
tout homme qui a, (parce qu’il a fait fructifier
le don qui lui est fait, parce qu’il
fait confiance à Celui qui lui donne) l’on donnera et il sera dans la
surabondance ; mais à celui qui n’a pas (parce qu’il ne croit pas au don et ne fait pas confiance à Celui qui
lui donne), même ce qu’il a (le don
qui lui a été fait) lui sera retiré”.
Mais
pire, il restera enfermé dans sa défiance et sa pensée mortifere : c’est
peut-être cela les “ténèbres et les grincements de dents”.
AMEN !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire