HOMELIE Dimanche de la FETE du CORPS
et du SANG du CHRIST
Jn 6,51-58 - 22 Juin 2014
« Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle… » Ces
paroles, si elles sont prises au premier degré, sont choquantes et
incompréhensibles. L’expression “boire le sang” viole l’un des tabous
alimentaires les plus forts de la Loi juive : interdiction absolue de
s’approprier le sang d’un animal et à plus forte raison d’un homme. Le sang, c’est
la vie (Lévitique 7,11) et la vie appartient à Dieu. On comprend que cela en
ait rebuté plus d’un.
Alors
comment comprendre ces paroles et que
croyons-nous lorsque nous allons recevoir le Corps du Christ ?
Quelques
précisions de vocabulaire pourront les éclairer et en faire saisir la
profondeur et le don incroyable que nous fait le Seigneur.
L’Evangile
de Jean n’emploie pas le mot corps “soma” [swma] comme le font les trois
autres Evangiles ainsi que Paul, mais le
mot chair “sarx”, [sarx]. Dans
la Bible le mot chair désigne non pas la matière faite de cellules, mais la personne qui est déterminée par son
corps. « Toute chair verra le salut de Dieu » « De nouvelle lune en nouvelle
lune, et de sabbat en sabbat, toute
chair viendra se prosterner devant ma face, dit Yahvé. » (Is
66, 23) et « Et si ces jours-là
n’étaient abrégés, personne (mot à
mot : toute chair) n’aurait la
vie sauve ». (Mt 24,22) La chair qualifie la condition terrestre et fragile,
par opposition à l’esprit qui indique l’origine céleste ou divine : « Le
Verbe s’est fait chair… » exprime l’abaissement du Fils du Père
qui prend, sans tricher, notre condition d’homme avec ses limites.
Enfin, la chair, sous l’influence de l’hellénisme, désigne parfois la
pesanteur de l’homme et sa propension au mal, au péché : « Car la chair
convoite contre l'esprit et l'esprit contre la chair; il y a entre eux antagonisme, si bien que vous ne faites
pas ce que vous voudriez » (Ga 5, 17)
Quant au mot corps,
il n’est pas sans signification non plus. Il n’est pas seulement la matérialité
d’un être. C’est lui qui nous donne notre identité. Il y avait, jusqu’à il y a
quelque temps, l’empreinte digitale ;
il y a maintenant l’œil et
évidemment l’ADN ! Je suis mon
corps ! Quant au sang, il
exprime évidemment la vie puisque
sans lui, nous sommes morts. Quand Jésus dit aux Apôtres : « Ceci
est mon Corps » Il dit : « Ce pain, c’est moi, et non un
autre ! Quand Il dit : « Ceci est mon sang » Il
dit : « Ce vin, c’est moi vivant ! ». Par ce langage
symbolique, Jésus invite les siens à Le recevoir, Lui, Dieu, et à recevoir la
vie qu’Il communique de sorte que nous pourrons, avec Lui, “livrer” notre
vie, ce qui n’est pas le plus facile à faire.
Les paroles
de Jésus portent encore un autre symbolisme très fort. Il est le Pain vivant : Il n’est plus ce
pain que Dieu a donné chaque jour à son peuple, la manne, tout au long de son
Exode pour le soutenir dans sa marche et le nourrir jusque la Terre Promise où il ne
sera plus nécessaire. Il est le « Pain descendu du ciel : si
quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement ». Désirons-nous
vraiment cette nourriture essentielle pour notre chemin sur la terre ? Ce
pain qu’Il nous donne « pour que nous vivions
éternellement » jusqu’à ce que nous soyons arrivés au terme
de notre vie, c'est-à-dire en Terre Promise ? « Donne-nous notre pain de ce
jour » demandons–nous dans le Notre Père. (Il est même écrit, mot
à mot : “Donne-nous le pain supersubstanciel”). Il est tellement
essentiel que Jésus ne nous demande pas seulement de le “manger” [fagon]
mais de le “mastiquer” [Trwgon], comme les juifs étaient invités à
mastiquer la chair de l’Agneau pascal pour goûter la libération d’Egypte que le
Seigneur leur offrait. Ne devons-nous pas goûter à notre tour la libération que
nous apporte “l’Agneau de Dieu qui
enlève le péché du monde” : Lui qui prend notre mal, nos péchés, pour nous
en délivrer ?
Rendons
grâce de tout notre être, corps, cœur, esprit, âme à Celui qui nous aime
jusqu’à se donner entièrement à nous et en nous et qui nous invite à faire
Corps avec Lui et à « former un seul corps puisque nous avons part à un seul
pain » (1 Corinthiens 10,17) !
AMEN !
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