HOMELIE 2° Dimanche de Pâques A. Jn 20,19-31
27 Avril 2014
La foi de Thomas
Pourquoi Thomas a-t-il douté ? Il est courageux ; il a du
caractère ; c’est le seul Apôtre à être sorti du Cénacle où les autres, la
peur au ventre, s’étaient verrouillés. C’était un réaliste, qui avait bien
compris qu’en montant à Jérusalem avec Jésus pour se rendre auprès de Lazare
qui était mort, il risquait la mort avec son maître : "Allons, nous aussi, pour
mourir avec lui!" Jn 11, 16. Il était prêt à
donner sa vie pour Jésus qu’il aimait passionnément. Sa mort l’avait
profondément déstabilisé : il était persuadé que Jésus saurait s’en
sortir, Lui qui était capable de ressusciter Lazare. Et voilà qu’Il était bien
mort.
Tout
devenait pour lui une immense question : quel était le sens de la vie de
Jésus ? De son témoignage ? De la pertinence de ses paroles et de son
enseignement puisqu’Il avait fini sa vie comme un pauvre malfaiteur, abandonné
de tous. Qu’on lui annonce que Jésus était vivant, alors là, c’était trop pour
lui : il ne voulait plus être trompé et déçu.
Son refus
de croire sans preuve venait peut-être aussi de ce que Jésus, s’étant manifesté
aux autres apôtres en son absence, il en était un peu jaloux et frustré d’avoir
manqué ce moment qu’il désirait inconsciemment si fort au fond de lui.
En tout cas, le dimanche suivant, de
nouveau Jésus se trouve au milieu d’eux : Il ne lui en veut pas et au
contraire s’adresse à lui pour combler son attente. Aussitôt éclate sa belle profession
de foi, la première qui désigne Jésus comme Dieu : « Mon Seigneur et mon
Dieu ! ».Jésus peut alors l’inviter à passer du voir au croire.
Sur le
chemin de la foi, nous sommes invités nous aussi à dépasser le désir bien
légitime de preuves visibles, concrètes pour accéder à une adhésion basée sur
la confiance.
Mais confiance en quoi ou en qui ?
D’abord,
confiance dans les témoins qui ont
donné leur vie pour dire ce qu’ils avaient vu et entendu et qui nous est
précieusement rapporté dans les Evangiles.
Confiance
dans la pertinence, la grandeur, la beauté et le bonheur qu’apporte la vie selon l’Evangile. Et, en ce
dimanche de la miséricorde, il est heureux d’évoquer la “présence” concrète,
réelle, visible du Christ dans celui qui a faim, froid, qui est malade, nu,
prisonnier chaque fois que nous allons à leur rencontre.
Confiance dans la Communauté réunie comme les
apôtres au Cénacle qui continue, dimanches après dimanches, à écouter les
paroles du Christ, à comprendre ses enseignements et à se nourrir de son Corps.
Enfin,
confiance dans le don de l’Esprit Saint
qu’au soir de sa résurrection, Jésus “souffle” sur les Apôtres et qu’Il donne
aujourd’hui à tous ceux qui le Lui demandent.
Non !
Le doute de Thomas
n’est pas le doute du sceptique, du soupçonneux, limité par sa raison, étranger au sens des réalités
qui lui échappent et qui se ferme à toute nouveauté, qui finalement reste seul
avec lui-même. Il est de ceux qui
questionnent devant l’extraordinaire, l’insolite, l’inattendu,
“l’incroyable” : ils veulent vérifier qu’ils sont bien dans la cohérence
et la vérité de ce qu’ils croient et que c’est accessible à tous ceux qui le
veulent bien.
Dieu est
tellement “autre” et les évènements, comme pour Thomas, sont tellement
déconcertants qu’il est courant, dans la Bible, d’entendre des croyants et
particulièrement des priants lui lancer des questions : Où es-tu ?
Que fais-tu ? Jusqu’à quand nous laisseras-tu dans cette détresse ?
Souvenez-vous du dernier cri de Jésus Lui-même sur la croix : « Mon
Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Début du Ps 22
qui se termine par un chant de louange : « 23 J'annoncerai ton nom à mes frères, en pleine
assemblée je te louerai ».
Ce sont des doute-questions qui débouchent sur la foi-louange.
Bienheureux
Thomas qui éduque nos propres doutes, nous invitant à poser les bonnes
questions ; à les partager entre nous ; à les porter et à les
dépasser jusqu’à exprimer joyeusement notre foi. Et qui est son “jumeau” ?
Ne le serions-nous pas tous un peu ?
AMEN !
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