HOMELIE 33ème
Dimanche Ordinaire A –Mt 25, 14-30 - 19 Nov. 2017
La Parabole des
Talents (Mt 25, 14-30).
A lire cette parabole au premier degré,
ce maître que Jésus présente comme image de Dieu est franchement
rebutant ! Immensément riche, dur, autoritaire, sans cœur… bref pas du
tout ce que nous essayons d’imaginer du Dieu de Jésus. Alors, pourquoi cette
Parabole ?
Lisons bien la parabole : qui
nous fait le portrait détestable de ce maître ? Les deux premiers Les serviteurs ? Non pas ! Comment eux-mêmes le
laissent-ils entrevoir ? D’abord, ils reçoivent leurs talents comme des dons. Le maître en effet “Remet”=Donne : (en grec, didomi) au premier cinq talents, au second deux. Le
mot désigne le don que l’on fait, dans un héritage par exemple (comme pour
l’enfant prodigue : Lc 15, 12). Il
donne, donc sans intention de reprise. Il lui transmet ainsi les pleins
pouvoirs sur ses biens qui ne sont plus les siens. Il fait plus : Il
est juste, délicat même ! Il
respecte chacun en leur donnant à “chacun
selon ses capacités”, c’est à dire, selon la force qui est propre à
chacun de porter des responsabilités. Puis Il part, longtemps… Là encore, après
avoir donné, Il fait confiance, dans une très grande liberté laissée aux
serviteurs du fait de sa longue absence.
Aussitôt, celui qui a reçu cinq talents
“va
œuvrer avec” dit le texte : il les travaille, les transforme, les
fait valoir et les deux premiers serviteurs gagnent chacun la somme équivalente
à celle que le maître leur avait confiée : cinq pour l’un, deux pour
l’autre. La production est bien sûr inégale, mais le comportement est
identique. Inégaux dans “l’avoir”, ils
sont semblables dans "l’être" : des créateurs, des
“fructifieurs” ! Que pensez-vous de ce maître ? Ne serait-Il pas “Le Créateur”, l’éveilleur en humanité.
Ne l’a-t-il pas faite à son image, comme sa ressemblance, donc créatrice ?
Lorsqu’Il vient… (Il n’est pas écrit “lorsqu’Il
revient” !) . S’Il re-venait, ce serait pour régler ses comptes. S’Il
vient, ne serait-ce pas parce qu’Il est intéressé de se rendre compte de ce que ses serviteurs ont fait des talents
donnés (Lui qui est immensément riche, avait-t-Il besoin de la plus value de
ses serviteurs ?). L’Evangile invite davantage à assister à un compte-rendu de l’usage que les serviteurs ont fait
de leurs dons, plutôt qu’à un règlement de comptes ! D’ailleurs, lisons bien
pour nous permettre de mieux comprendre. L’Evangile écrit : “Celui qui a
reçu 5 talents s’approche en apportant cinq autres, disant : ‘Maître, tu
m’as remis cinq talents : Vois ! Cinq autres j’ai gagnés !’
- Très bien serviteur bon et fidèle…”
Avez-vous fait attention ? Le serviteur ne présente pas dix
talents, mais les cinq qu’il a gagnés, son
œuvre à lui, preuve qu’il a bien compris que son maître lui avait donné
les cinq premiers talents. Quant au maître, Il peut voir, se rendre compte qu’il a bien placé sa confiance dans
ces deux serviteurs. Il peut alors
consacrer ces serviteurs, non plus dans ce qu’ils ont "en plus" mais
dans ce qu’ils sont devenus, semblables
à leur maître, capables de créer, de faire fructifier. Ce maître retrouve
des serviteurs à qui Il peut confier beaucoup, qui peuvent entrer dans la joie
de leur maître. Et tout cela est bon, comme au temps de la Création où Il avait
demandé à l’homme de la faire fructifier.
Tout autre est l’attitude du serviteur qui n’a reçu qu’un talent,
lui aussi "selon ses capacités". Il est d’usage de s’apitoyer sur
lui, mais regardons bien son comportement. Il n’a pas compris que le Maître lui donnait, comme aux autres, son
talent (somme colossale correspondant à 17 ans de salaire !). Se défiant
de son maître, (même attitude à l’origine
du premier péché, dit “péché originel», souvent inconscient, inavoué mais caché
au fond du cœur de l’homme), il va
se fabriquer une idée détestable de ce maître : exigeant, dur et sans
appel, un maître qui va revenir demander des comptes. Cette idée va polluer sa
pensée, son cœur, son imagination, si bien qu’il sera paralysé et qu’il n’aura
même pas l’initiative de déposer son talent à la banque pour le faire fructifier !
Il l’a enfoui, enterré : comportement de mort, comme le regard qu’il porte
sur son maître.
La raison de cette
parabole ?
Pas
seulement de nous faire savoir que Dieu attend que nous fassions fructifier nos
talents. Mais aussi et surtout nous
interroger sur l’image de Dieu que nous avons dans la tête ? Dans le
cœur ? Le voyons-nous comme un
personnage, sans état d’âme, qui nous demanderait de faire fructifier ses biens
et viendrait régler ses comptes avec nous jusqu’au dernier centime ? Un
dieu d’une exigence telle qu’il ne pourrait qu’engendrer l’inquiétude et la
peur de ne pas être à la hauteur ?
Ou alors comme quelqu’un qui nous donne de ses biens, à chacun
selon nos capacités, sans intention de reprendre, mais en nous faisant
confiance, en nous voulant “créateur”
comme Lui ? …Et qui n’attend qu’une
chose : nous donner davantage et nous faisant entrer dans sa joie.
Enfin, comment comprendre la phrase finale, un peu
énigmatique ? “A tout homme qui a, (parce
qu’il a fait fructifier le don qui lui
est fait, parce qu’il fait confiance à Celui qui lui donne) l’on donnera et
il sera dans la surabondance ; mais à celui qui n’a pas (parce qu’il ne croit pas au don et ne fait
pas confiance à Celui qui lui donne), même ce qu’il a (le don qui lui a été fait) lui sera retiré”.
Mais
pire, il restera enfermé dans sa défiance et sa pensée mortifère : c’est
peut-être cela les “ténèbres et les grincements de dents”.
AMEN !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire