HOMELIE 23ème Dimanche Ordinaire, Année A –Mt 18, 15-20
7 Septembre 2014
Dans ce très bel Evangile, il est
question de la correction fraternelle. A vrai dire, pour ceux qui ont essayé de
la pratiquer, elle est une démarche particulièrement délicate et risquée et les
conseils de St Matthieu nous sont bien précieux, à condition de bien les
comprendre, car ils peuvent à première écoute, rebuter voire scandaliser.
Ce qui peut rebuter :
- C’est
de se faire juge du
comportement de son frère et la parole du Christ résonne à notre
conscience: « Ne jugez pas, afin de n'être pas jugés… Qu'as-tu à regarder la paille
qui est dans l’œil de ton frère? Et la poutre qui est dans ton œil à toi, tu ne
la remarques pas! Ou bien comment vas-tu
dire à ton frère: Laisse-moi ôter la paille de ton œil, et voilà que la poutre
est dans ton œil! Hypocrite, ôte d'abord
la poutre de ton œil, et alors tu verras clair pour ôter la paille de l’œil de
ton frère. » Mt 7,3-4 Et de nous dire :
« Qui sommes-nous pour faire cette démarche ? »
- C’est aussi d’en parler à d’autres : il y a là comme un relent de
dénonciation ou de commérage !
- C’est enfin, la phrase de
Jésus : « Qu'il soit pour toi comme le païen et le publicain. » Ne laisse-t-elle
pas carrément penser à une exclusion, ce qui est souvent
rebutant à faire !
Que répondre à tout cela ?
Lorsque Jésus demande de ne pas juger,
Il dénonce l’attitude qui consiste à
cataloguer quelqu’un et à porter un
verdict sur lui. Jésus a bien jugé, mais non les personnes (même si parfois
elles se font traiter d’hypocrites, de serpents ou d’engeance de vipères :
Mt 12, 34 ; 23, 33…). Par contre, Il demande plusieurs fois de discerner, d’examiner, d’être avisés (comme l’homme qui
construit sa maison sur le roc (Lc 14, 28), ou comme le serpent (Mt 10,16), ou
comme les vierges sages (Mt 25,2).
Quant
à parler avec d’autres du mauvais comportement de quelqu’un, c’est bien risqué :
je peux me tromper ou exagérer. Puisque l’autre nie, je dois m’assurer que mon
discernement est bon et donc, j’en réfère à un ou plusieurs frères ; et en
cas de nouvel échec, à la Communauté toute entière. Tout doit se faire dans le respect et l’amour d’un frère pour
qu’il se détourne d’une voie qui le conduit au malheur.
« Qu'il
soit pour toi comme le païen et le publicain. », c’est loin d’être
une excommunication, car Jésus, bien souvent, admire les païens comme la
Cananéenne ou le Centurion… et mange chez les publicains : Il en a même choisi
un comme Apôtre : Matthieu. Que nous dit Dieu par la voix du prophète
Ezéchiel que nous avons entendu en première lecture ? « Si je dis au méchant: "Méchant,
tu vas mourir", et que tu ne parles pas pour avertir le méchant
d'abandonner sa conduite, lui, le méchant, mourra de sa faute, mais c'est à toi
que je demanderai compte de son sang. » Ez 33,8. Cette Parole de
Dieu nous rend « guetteur » solidaire
du pécheur et nous oblige à ne pas prendre notre parti de sa mauvaise
conduite. Mais, si le pécheur ne veut pas y renoncer, cela pourrait nous conduire à une culpabilité très grande,
celle de n’avoir pas réussi tout en restant solidaire ! Jésus
s’adresse donc à tous ceux qui ont humblement essayé de détourner le pécheur de
sa conduite mauvaise : Il veut les délier de toute responsabilité
vis à vis du pécheur qui s’obstine dans sa conduite mauvaise pour qu’ils ne
portent pas, en plus de la tristesse qu’ils ressentent de son refus à se
convertir, une culpabilité qui les blesseraient ou même les paralyseraient.
Les
païens et les publicains n’étaient plus
sous le régime de l’Alliance des Fils d’Israël. Ceux-ci ne devaient donc
pas avoir de contact avec eux et ils les méprisaient copieusement ! Jésus
invite donc ses disciples à ne plus être solidaires avec le pécheur qui
s‘obstine, comme il avait recommandé aux disciples de secouer la poussière de
leurs sandales là où les gens n’avaient pas reçus de leur part la Bonne Nouvelle en
son Nom.
Que le Seigneur nous aide à être
humblement « guetteurs », solidaires avec un frère que nous pensons
être en danger et à oser le trouver, après discernement et prière à l’Esprit
Saint, esprit d’amour et de respect. Que nous découvrions
qu’ensemble nous sommes solidaires avec
Dieu-même qui prend au sérieux nos décisions car Il nous a donné le pouvoir de lier et délier.
AMEN !
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