samedi 26 mars 2016

HOMELIE Dimanche de Pâques. 27 Mars 2016 Jn 20,1-9



HOMELIE  Dimanche de Pâques. 27 Mars 2016
Jn 20,1-9

La Résurrection du Christ : il y a voir et voir !

La Résurrection de Jésus, comment en parler ? C’est tellement nouveau et mystérieux ! St Jean nous la présente à travers le témoignage des deux disciples, Pierre et Jean, qui au petit matin de Pâques, alertés par Marie de Magdala, se rendent en hâte au tombeau où l’on avait déposé Jésus. En quelques étapes, par le choix du vocabulaire, il nous fait progresser vers la foi en cet évènement. Parcourrons le récit.

Tout d’abord, Marie de Magdala se rendant la première au tombeau a vu que la pierre fermant le tombeau a été roulée : le tombeau est donc ouvert. Le verbe utilisé ici est blèpo, blepw qui signifie voir-constater, qui donnerait lieu à un procès-verbal décrivant ce que l’on voit de nos yeux de chair. Elle ne va pas plus loin ; elle n’entre même pas pour chercher d’autres indices. Sur ce constat, elle en déduit qu’on a enlevé du tombeau le Seigneur et s’engage sur une fausse piste. Ayant alerté les Apôtres, Simon-Pierre et “le disciple que Jésus aimait” sortent à leur tour et se mettent à courir vers le tombeau, eux-mêmes intrigués.
 v.5 - Le disciple arrive le premier, se penche et voit (même verbe blèpo) “les linges qui sont là, à plat” *. Nouveau constat, avec un nouvel indice : les linges, retombés à plat. Mais il n’entre pas.
v.6 - Simon-Pierre arrive à son tour: “Il entre dans le tombeau et voit les linges, à plat v.7 et le tissu qui était sur sa tête n’est pas à plat avec les linges, mais enroulé, lui, en sa place” *.
Le verbe ici est théorao  qewraw (qui a donné en français : théorie, théoriser, théorème...) Il signifie : observer, regarder attentivement, examiner, inspecter et même contempler. Simon-Pierre se met donc à tenter de comprendre ce qu’il voit, d’en chercher le sens.
v.8 - Entre alors l’autre disciple : “Il vit et il crut”. Un troisième verbe est utilisé : Oraooraw [qui, sous une autre forme conjugale, a donné en français : ophtalmo]. Ce verbe signifie de façon courante : voir, mais il a aussi le sens imagé de « voir avec les yeux de l’esprit, de l’intelligence » c’est à dire comprendre.  D’ailleurs au verset suivant, v.9, l’évangéliste commente : “ En effet, ils n’avaient pas encore vu l’Ecriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts”. Or c’est le même verbe voir/orao qui est traduit habituellement par comprendre.

Voilà donc le chemin de la foi en la Résurrection de Jésus parcouru par « le disciple que Jésus aimait » Il nous invite à le faire à notre tour. On ne peut croire en la Résurrection s’il n’y a pas d’abord le constat (blèpo) de la mort de Jésus selon la chair. Suit notre recherche du sens (théorao) pourquoi n’est-il plus là ? N’y aurait-il pas une vie après la mort ? Mais ces questions, toutes bien normales, ne suffisent pas pour croire : il faut voir (orao) au-delà du visible.
A tous ceux qui chercheraient des preuves de la Résurrection, il leur est demandé de changer leur manière de voir. “Moïse...en homme qui voit (orao) l’invisible (a-oraton), tint ferme” He 11, 27
A tous ceux qui veulent croire, il leur est demandé de partir de la réalité visible de l’existence pour accéder, grâce aux signes et au témoignage de des Apôtres qui ont donné leur vie pour cela, ainsi qu’à l’Ecriture lue ensemble en Eglise, pour accéder à la réalité invisible qui ne se confond pas avec nos imaginaires, tentés par nos délires. (cf. les tentatives sectaires ou à mouvance New Age).

                   Croire, c’est passer du voir-avec-nos-yeux-de-chair Celui qui s’est fait chair pour nous au voir, Celui qui est le Christ, le Fils de Dieu, ressuscité, non sans chercher à comprendre, comme Simon-Pierre.

                   Ce désir de voir n’est pas méprisable. N’est-ce pas pour cela que Jésus a dit à l’apôtre Philippe à la veille de sa mort: “Qui me voit, voit le Père” (Jn 14, 9) ? C’est pour cela encore qu’après sa Résurrection, Jésus « se donnera à voir » aux Apôtres et à Thomas en particulier, afin qu’ils disent ce qu’ils ont vu. Ce qui n’empêchera pas Jésus de féliciter ceux qui ne pourront être les témoins privilégiés, comme les apôtres, de ce voir : « Parce que tu m’as vu, tu as cru ;  bienheureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru » Jn 20, 28.
AMEN !

* Evangile dans la traduction de sœur Jeanne d’Arc, Ed. Desclée de Brouwer.

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