HOMÉLIE TOUSSAINT. Les Béatitudes (Mt 5, 1-12a)
Vendredi 1er Novembre 2024.
« Heureux ! » Quel défi lancé au bon sens commun par chaque béatitude! « Heureux les pauvres, les doux, ceux qui pleurent, les affamés de justice, les miséricordieux… » C’est tout le contraire qui est proposé par la culture ambiante ! Oui, mais "Heureux" dans la Bible veut dire : "Bravo, félicitations: tu as tout compris ! " et même, en hébreu, ashsreï , peut se traduire par "en marche", car ce mot évoque la rectitude de l’homme qui marche sur une route qui va droit vers Dieu ! (note dans la Bible traduite par André Chouraqui)
Il convient bien sûr de ne pas faire de fausse interprétation sur ces béatitudes et tout d’abord, de les traduire correctement. Pauvre n’est pas opposé à riche, mais à orgueilleux (Pauvre de cœur, mot à mot : « petit de souffle » [pneuma et non cardia, est-il écrit dans l’original grec] c'est-à-dire gonflé de soi-même, et donc il y a de la place pour les autres… et pour Dieu ! Toutes les autres béatitudes en découlent et elle est au présent. Prenons quelques-unes de ces Béatitudes.
Ainsi, "Heureux ceux qui pleurent ! "Mot à mot : Heureux ceux qui sont en deuil”. Car ils vivent un manque profond de l’absence de celui ou celle qui est décédé, et ce manque les rend aptes à chercher et accueillir ce qui les comblera définitivement : “Ils seront consolés” “Paraclèthèsountaï”. Ce mot est formé à partir du verbe Parakaleo qui signifie "appelé à côté de…" et qui dans l’Évangile de St Jean désigne le Paraclet c’est-à-dire l’Esprit-Saint Lui-même, l’avocat, le consolateur (Jn 14, 16.26). Il s’agit d’une véritable promesse théologale, divine, où Dieu s’engage à être présent à nos côtés dans l’épreuve du deuil, bien au-delà de ce que nous aurions pu attendre.
Heureux ceux qui ont faim et soif de justice ! Il ne s’agit pas tant de la justice au sens habituel du mot, (qui est régie par des lois pas toujours justes ou mal adaptées) mais d’être “ajusté à Dieu” ; ceux qui cherchent à comprendre et faire sa volonté, car ils constatent que bien souvent elle n’est pas respectée : nous la demandons en priant le Notre Père.
Heureux les miséricordieux ! “Eléèmones, qui a donné en français aumône ; aumônier des hôpitaux, des galères…bref les miséricordieux sont ceux qui, comme Dieu, compatissent à la détresse de ceux qui endurent des manques essentiels.
Heureux les cœurs purs ! Littéralement : “Purs [catharoï] de cœur” qui ne sont pas doubles ; qui n’ont qu’un seul comportement avec Dieu comme avec les autres. Nets. “Que votre parole soit oui, oui ! non, non ! Tout le reste vient du mauvais” Mt 5, 37. Il y a tant de mensonges autour de nous, colportés sur les réseaux sociaux, certains médias, publicité, quand ce n’est pas au cœur de nos familles, de nos entreprises ou des institutions.
Voilà donc pour quelques-unes de ces Béatitudes traduites au plus près du texte grec d’origine. Elles relèvent toutes d’une même disposition : celle de la reconnaissance d’un manque
Mais elles peuvent aussi nous effrayer par leurs exigences.
C’est là que les saints nous sont d’un grand secours à condition de ne pas les prendre d’abord comme des héros, mais comme des femmes et des hommes de foi qui ont fait confiance en écoutant et suivant leur maître et Seigneur Jésus. Un jour ou petit à petit, ils ont été touchés par une parole du Christ et ils ont découvert qui était le Père dont parlait si souvent Jésus. Un Père passionnément amoureux des hommes et qui désire que chacun devienne son enfant comme nous le rappelait St Jean dans la deuxième lecture de cette fête. Bien sûr, le Père compte sur notre concours et ne fait rien sans nous : c’est une question d’amour respectueux. La multitude de ces hommes et de ces femmes que nous dévoilait l’Apocalypse a donc écouté le Fils et mis en œuvre une des béatitudes en l’accomplissant jusqu’au bout. Ils ont pris conscience de leurs manques ; ils ont su qu’ils ne pourraient être heureux tout seul ; que le Seigneur vient les sauver, les libérer de leurs enfermements, péché d’origine, s’il en est un ! C’est en nous engageant sur ce chemin de bonheur que l’Esprit de Dieu transforme notre cœur en venant l’habiter et en combattant avec nous contre les forces du mal. Jésus n’a-t-Il pas illustré Lui-même ces Béatitudes tout au long de sa vie ?
En Communion avec Lui et avec tous les saints et bienheureux, choisissons l’une des béatitudes et familiarisons-nous avec l’un ou l’autre de ces aînés en le prenant comme “parrain” ou “marraine”, mais également comme intercesseur, actif auprès du Père dans cette immense Communion des Saints que nous proclamons chaque Dimanche dans notre Credo.
Rendons grâce au Seigneur pour le Trésor spirituel qu’Il nous offre et Bonne Fête à Tous !
AMEN !