HOMELIE 4ème Dimanche Carême C - Luc 15, 1-32.
31 Mars 2019
Le Père prodigue
Quel est ce père qui accepte de donner une part de son héritage à
un fils qui veut le quitter et qui sans doute ne reviendra jamais ?
D’habitude, un héritage, çà se reçoit quand le père est mort ! Mais ici,
il est bien vivant !
Quel est ce père qui longtemps guette le retour de ce fils égoïste
et ingrat pour se jeter à son cou, au lieu de lui poser mille questions sur les
raisons de son retour ?
Quel est ce père qui revêt ce fils d’un habit de fête, lui donne
l’anneau à la main (qui équivaut à l’époque à la signature de son compte en
banque) ; puis qui fait tuer le veau gras pour festoyer avec toute la
maisonnée au lieu de le mettre à l’épreuve et
de lui faire expier sa faute ?
Ce père a deux fils, qui l’un comme l’autre n’ont guère de
véritable amour pour lui. Le cadet égoïste et jouisseur ; l’aîné, servile,
n’ayant avec son père qu’une relation de « donnant- donnant ».
Que va-t-il faire ?
Au cadet, il
laisse faire son expérience mais l’attend. Lorsqu’il revient, il est saisi aux
entrailles et le rétablit comme fils dans ses droits : ce pardon ouvre la
porte de la vie, fait entrer dans le mystère de l’amour total. Le cadet devient
libre, parce qu’il fait l’expérience de la gratuité de l’amour, le passage de la mort à la vie : « Mon
fils que voila était mort et il est revenu à la vie ! »
Au fils ainé, le
père manifeste tout autant sa tendresse : il sort à sa rencontre, il veut
le délivrer de son attitude servile et utilitaire qui lui vaut de revendiquer
des droits, mais aussi, d’être effroyablement jaloux, coléreux et enfermé sur
lui-même : « Toi mon enfant, tu es toujours avec moi ! Et tout ce qui
est à moi est à toi ! »
Ce père incroyable, c’est Dieu Lui-même.
C’est Jésus, son Fils qui nous en parle parce que seul Lui Le connaît bien.
Il nous le présente ainsi parce que dans notre cœur ou dans notre tête,
nous avons bien souvent des images de Dieu à la ressemblance de ce que nous
voyons chez les hommes. Dieu nous “juge” ; Dieu nous “punit”
(souvenez-vous de l’Évangile de dimanche dernier sur les massacres de Pilate et
les victimes de l’effondrement de la tour de Siloë). Ce sont des images fausses
du Dieu de Jésus. Ce n’est pas compliqué : Dieu est comme Jésus.
D’ailleurs, un jour, un des ses disciples, Philippe, lui demande : « Montre-nous
le Père et cela nous serons suffit ! – Jésus lui dit : “Il y a si
longtemps que Je suis avec vous et tu ne
me connais pas, Philippe ? Celui qui m’a vu a vu le Père… » Jn 14, 8-9.
Ce Dieu, n’est-Il pas le « Père
Prodigue », qui rend à chacun dignité et liberté : par sa parole,
par son regard, son émotion. Il nous l’a fait savoir par son Fils « qui
est sorti » pour nous faire
entrer dans sa maison, réconciliés avec Lui, avec nos frères et avec nous-mêmes.
Qui ne se retrouvera pas, peu ou prou, dans ces portraits de fils.
L’un apparemment vertueux, fidèle mais à l’étroit, aliéné. L’autre, tout autant
aliéné, égoïste, jouisseur, se perdant dans ses désirs jamais satisfaits.
Oui, en cette période de scrutin qui achemine les
catéchumènes vers le Baptême, nous pouvons en toute confiance professer notre
foi en ce Dieu tout-puissant, mais de la seule toute-puissance de l’Amour et nous
entendre dire chacun : « Toi mon enfant… ! ». Répondons
à cet appel pressant et affectueux ; retrouvons la joie de Lui ouvrir nos
cœurs pour entrer dans son amour gratuit et sans mesure pour « être
toujours avec eux, Père, Fils et Esprit Saint ».
AMEN !